Paroles de la chanson Diamant noir par Alexandre Poulin

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Paroles de la chanson Diamant noir par Alexandre Poulin

Quand le soleil se lève
Je me lève avec lui
Je marche sur les orteils
Pour ne pas faire de bruit

Car la toile des tentes
Est tendue comme des tympans
Et ma mère dans son ventre
Attend un autre enfant

À l’orée du village
Je cours dans la clairière
Où la plaine est sauvage
Et le vent éphémère

Mes amis m’y attendent
Le ciel est blanc et bleu
La vie comme une danse
Je suis un enfant merveilleux

Mais à la nuit tombée
Mes frères et mes sœurs
Ne font que raconter
De folles histoires d’horreur

Au milieu desquelles
Même grand-père a peur
Et où le couteau des rebelles
Fait des enfants des tueurs

Le temps est mauvais
Le ciel est rouge et gris
Les histoires étaient vraies
J’entends ma mère qui supplie

Mais les soldats la tiennent
Tirent dans les airs en riant
Le village est terre de Sienne
Et la lune pleine de sang

Quand les rebelles s’enfuient
Il ne reste plus rien
Sinon un peu de pluie
Pour me laver les mains

Je sors de ma cachette
Le village est en feu
Il ne reste que les miettes
Et j’aurais dû fermer les yeux

Je me mets à courir
Sans trop vraiment savoir
Mes larmes comme des saphirs
Font briller ma peau noire

Si les soldats reviennent
Ils me feront la peau
Je marche de nuit, je mange à peine
Et adieu le Congo, go!

Les villages sur la crête
Sont devenus tout petits
Et où le sentier s’arrête
Je marche dans la nuit

La route est devenue champ
Le champ est devenu terre
La terre est sable blanc
Et se jette dans la mer

Bien sûr, les anciens
Nous avaient raconté
Les grands déserts marins
Débordant d’eau salée

Rapidement, on m’escorte
Pour me mettre à l’abri
Pendant que le bateau m’emporte
Je ne sais plus qui je suis

J’aurais voulu leur dire
Ce qu’est devenue ma famille
Autour de moi des martyrs
Ont tous vécu bien pire

J’ai laissé mon enfance
Sur une plage d’Afrique
Et le bonheur crie vengeance
Dans mon cœur dynamite

Au bout de l’océan
Les gens sont morts aussi
Leur visage est aussi blanc
Que les fantômes de mon pays

Leur cité est infinie
Leurs maisons jusqu’au ciel
Et le bitume et le gris
Mangent la forêt et la plaine

Je ne comprends pas un mot
De tout ce qu’on me dit
Je me sens comme un idiot
Mais au moins on me sourit

Un petit couple étrange
Vient souvent me visiter
Il m’appelle «mon ange»
Et décide de m’emmener

Malgré leur amour
Et la bonté dans leurs yeux
Les couvertures en velours
Et les jouets dispendieux

Je plante les ongles
Dans les paumes de mes mains
Pour penser à autre chose
Qu’au venin du chagrin

Aujourd’hui, j’ai oublié
Le visage de ma mère
Et les odeurs associées
Au feu et à la terre

Et quand dans le journal
On parle de mon pays
Même ici, à Montréal
Je tremble dans mon taxi

Maintenant que je suis grand
J’ai compris bien des choses
Et qu’en me sauvant à huit ans
C’était moi le fantôme

On perd la lumière
Et la vie qui va avec
Quand le vent de la clairière
Souffle celui des machettes

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